Cour de Cassation 21 novembre 2018 / Contrepartie du temps d’habillage, Deux conditions cumulatives, Obligation ET Lieu de travail /
" (...) Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, selon contrat à durée indéterminée en date du 29 mars 2007, M. Y... a été engagé par la société Câbleries Lapp (la société) en qualité d'agent de production ; qu'il a soutenu avoir été victime de violences physiques et psychologiques de la part de l'un de ses collègues de travail, M. B..., les 28 et 29 septembre 2009 ; qu'il a été placé en arrêt maladie du 17 septembre 2011 au 22 avril 2012 ; qu'après deux avis du 23 avril 2012 et du 7 mai 2012, il a été déclaré inapte à tout poste au sein de la société ; que convoqué le 12 juin 2012 à un entretien préalable au licenciement, il a indiqué à son employeur avoir été victime de harcèlement moral de la part de M. C..., son chef de poste ; qu'après enquête interne confiée au comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail sur les faits dénoncés par M. Y..., qui a conclu que le harcèlement moral dont il estimait avoir été victime de la part de M. C... n'était pas établi, la société a licencié le salarié pour inaptitude le 22 novembre 2012 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Vu l'article L. 3121-3 du code du travail ;
Attendu qu'aux termes de ce texte les contreparties dont fait l'objet le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage sont accordées soit sous forme de repos, soit sous forme financière, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, par des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail ; qu'il en résulte que le bénéfice de ces contreparties est subordonné à la réalisation des deux conditions cumulatives prévues par ce texte ;
Attendu que, pour condamner la société à payer au salarié une certaine somme à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre congés payés afférents, l'arrêt retient que le salarié verse aux débats l'intégralité de ses relevés de pointage, sur une période allant du mois de juin 2009 à septembre 2011, permettant de recenser au jour le jour le nombre d'heures effectuées, lesquelles sont ensuite comptabilisées en fin de semaine dans ces mêmes relevés, que l'employeur soutient que le salarié se changeait tous les jours dans les vestiaires, avant de prendre son poste de travail et après avoir pointé, de sorte qu'il ne serait pas tenu au paiement d'habillage ; que toutefois, conformément à l'article L. 3121-1 du code du travail, la société ne conteste pas que le salarié était astreint au port d'une tenue de travail, si bien que ce temps d'habillage et de déshabillage doit normalement être compris dans la durée de travail effectif ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que les salariés astreints au port d'une tenue de service avaient l'obligation de la revêtir et de l'enlever sur le lieu de travail, ni qu'un accord collectif ou une clause du contrat de travail assimilait le temps d'habillage et de déshabillage à du travail effectif, la cour d'appel a violé le texte susvisé "
Cour de cassation
Chambre sociale
Audience publique du mercredi 21 novembre 2018
N° de pourvoi: 17-17758