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Cour de Cassation 4 mars 2020 / Dénigrement entre entreprises, Divulgation d'une information /

Le 22 mai 2020

" (...)  Vu les articles 1240 du code civil et 873, alinéa 1, du code de procédure civile ;

Attendu que même en l'absence d'une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l'une, d'une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par l'autre constitue un acte de dénigrement, à moins que l'information en cause ne se rapporte à un sujet d'intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, et sous réserve qu'elle soit exprimée avec une certaine mesure ; (...)Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en matière de référé, que la société Marbrerie des Yvelines (la société MDY) fabrique et commercialise des plans de travail en marbre, en granit et pierre naturelle et en quartz de synthèse ; que, soupçonnant ce dernier matériau d'être dangereux pour la santé de ses employés, la société MDY a fait réaliser une étude par l'Institut de recherche et d'expertise scientifique de Strasbourg (l'IRES), et publié sur son site internet et sur les réseaux sociaux de son dirigeant les résultats des deux rapports établis par cet organisme confirmant la présence de composants dangereux dans le quartz de synthèse, puis a lancé une alerte auprès du magazine "60 millions de consommateurs" en indiquant que ce matériau était dangereux pour la santé, non seulement lors du façonnage, mais aussi "lors de l'utilisation quotidienne en cuisine" ; qu'après une mise en demeure, restée infructueuse, de cesser cette campagne, qualifiée de dénigrement, l'association A. St. A World-Wide (l'association World-Wide), qui a pour objet de promouvoir la réalisation de plans de travail de cuisines et salles de bain en quartz de synthèse et qui regroupe plusieurs fabricants de pierres agglomérées, invoquant l'existence d'un trouble manifestement illicite et un dommage imminent, a assigné en référé la société MDY, afin d'obtenir, sous astreinte, des mesures conservatoires de retrait et d'interdiction de diffusion des informations relatives aux études menées par l'IRES concernant le quartz de synthèse ; (...) Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté d'un côté, que le message diffusé publiquement par la société MDY faisait état du danger présenté par les plans de cuisine en quartz de synthèse, qui ont des composants cancérigènes et mutagènes, tel un article intitulé "Alerte de nocivité : les plans de cuisine en quartz de synthèse sont dangereux", publié le 2 février 2017, relayé dans le magazine "60 millions de consommateurs" du 8 mars 2017 par l'affirmation que "cette matière est non seulement dangereuse pour la santé lors du façonnage mais également lors de l'utilisation quotidienne en cuisine", de l'autre, que les rapports de l'IRES, invoqués au soutien de ces affirmations, étaient critiqués tant par les deux experts mandatés par l'association World-Wide que par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, qui soulignaient que les tests de l'IRES n'avaient pas été réalisés dans des conditions normales d'utilisation par des consommateurs, et que l'IRES lui-même reconnaissait que son étude ne portait pas sur l'évaluation des migrations de substances contenues dans l'air ou les denrées alimentaires en contact avec ce matériau, ce dont il résultait que l'information divulguée ne reposait pas sur une base factuelle suffisante au regard de la gravité des allégations en cause, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ; (...) "

Cour de Cassation

Chambre commerciale

Audience publique du mercredi 4 mars 2020

N° de pourvoi: 18-15651

SOURCE : LEGIFRANCE