Quels nouveaux liens avec les salariés en sortie de confinement ?
«Quels nouveaux liens avec les salariés en sortie de confinement ?»
Webinaire du 07 mai 2020 organisé par Miroir Social
Sur la pandémie actuelle, les sujets ne manquent pas et les 26 ordonnances d’urgence sanitaire suivant les autres ordonnances typées Macron, toujours en vigueur, témoignent d’un monde économique et social pour le moins bousculé.
Un angle social évidemment abordé lors d’un Webinaire organisé par Miroir Social. Recueil de quatre témoignages terrain.
Aude d’Argenlieu, psychologue clinicienne et directrice générale de l’IAPR
Il existe déjà des individus confrontés à des difficultés personnelles mais accrues par le confinement : des situations individuelles se retrouvant en télétravail mais déjà auparavant en situation de fragilisation.
Le soutien social est certainement diminué : plus de collègues de travail, plus de temps convivial pris sur le temps de travail. Il est important de maintenir le lien managerial lié au contrat de travail et aussi le lien personnel.
On peut observer deux phases dans le confinement : la première phase, une grande mobilisation pour assurer la pérennité économique. Des routines se mettent en place avec de nouvelles solidarités. Et une deuxième phase de résilience où l’objectif est de tenir.
Le premier vecteur du lien, c’est de maintenir les échanges d‘informations sur l’entreprise mais sans mélanger avec d’autres aspects plus personnels .
On parle certes d‘un déconfinement mais un autre aspect du confinement va perdurer : une reconfiguration du métier exercé. L’expérience du confinement a créé de nouvelles demandes notamment en matière de rythmes de travail : est-ce que je fais la même chose chez moi qu’au bureau ; suis-je plus productif, plus créatif chez moi ? Généraliser une réponse n'a pas de sens.
Il fait aussi penser aux personnes au seuil du départ en retraite : à garder dans le périmètre du lien dans cette même perspective de confinement/déconfinement.
Bernard Vigourous, délégué syndical central FO Leroy Merlin
Chez nous, chez Leroy-Merlin, nous avons mis en place des interventions en direct (200 connexions simultanées en moyenne) pour maintenir un lien entre salariés. On a fait finalement le boulot de la RH en répondant à leur place. Il existe en effet un peu (trop) de culture du secret côté direction.
En retour de ces « lives », on a autant de messages de soutien professionnel que personnel : « merci, c’est sympa de se voir ». Ce moment particulier met en exergue le rôle du DS. Etre DS, c’est s’exposer. Çà fait partie du job.
Fallait-il craindre une rupture techno entre salariés ? A partir du Facebook Leroy-Merlin, finalement, on a découvert que beaucoup de collègues y était déjà sans aucun problème de barrière technologique. Ces « lives », ce n’est pas un JT mais quelque chose de personnalisé avec un côté de spontané, pas de montage sophistiqué, de préparation de texte, de com insipide. Une dimension simplement humaine et c’est très apprécié.
A la sortie du confinement, les IRP vont avoir compilé une véritable banque de données pour l’étude des RPS (Risques Psycho-Sociaux). Les RPS sont vus par les entreprises comme une contrainte et même sous-traitée par elles. Pourtant, cette période, c'est l'occasion d'un changement d'angle : les RPS comme résultantes du confinement amenant vers un nouveau mode de fonctionnement.
Daniel Coutaudier, délégué syndical central CFDT Nexter
Chez, nous, pas de « live » mais une autre méthode s’est imposée naturellement : une communication avec une logique de maillage étroit avec d’autres élus.
Cela vient de l’histoire de NEXTER, anciennement, les arsenaux d’Etat. NEXTER, c’est un milieu avec des types très différents de métier : des études, de la production, de la logistique avec tous les niveaux professionnels. C'est aussi une entreprise éprouvée par une succession de PSE depuis 2010 et en négociation permanente.
Certains collègues n’ont aucune boite mail au travail. Donc nous avons utilisé le bon vieux moyen de la presse écrite, un tractage à l’ancienne militairement effectué. Cela nous a permis d’avancer sur les informations données avec la direction. La direction a compris l’enjeu de partager avec nous pour faire accepter les mesures par les salariés. D’où des réunions quotidiennes avec la direction.
Celle-ci a exceptionnellement accepté d’envoyer les tracts vers les boites pro. Heureusement, le lien social perdure chez nous car il y a un réel « collectif » au travail : on a tous les numéros de tél des collègues proches. Avec ce « pot commun » des infos entre syndicats sur les questions de santé, il n’y a pas eu de tension entre nous.
ACCORD NEXTER sur les mesures d'accompagnement Covid-19.
Christine Fourage, secrétaire générale du syndicat CGT l’enseignement et de la formation privés
Dans notre secteur, féminisé à 80%, nous avons des personnes qualifiées de « précaires » avec une pluralité d’employeurs et à temps très partiel. Des petites structures et quelques gros opérateurs.
Récemment, une déléguée syndicale a reçu un avertissement pour diffusion d’un message d’information à propos des mesures de prévention. Il y a pourtant urgence sociale : la CGT assume ce qu’elle a fait. Il existe aussi une certaine pression sur les salariés pour la prise de congés imposés.
Pour répondre aux questions précises des salariés, nous avons mis en place des FAQ de droit public et droit privé. Outil conçu dès le départ comme syndical….mais nous répondons à tous, syndiqués ou non en faisant le lien avec le niveau départemental, branche etc… afin qu’ensuite, il y ait un réel accompagnement plus personnalisé.
Nous avons constaté aussi un télétravail en mode très dégradé, en version « débrouille toi ». Ce mode de fonctionnement à l’arrache, c’est finalement destructeur car pas évident de tisser des liens entre salariés à distance, DS et salariés sur site.
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